Le Jugement de saint Pierre et La Crucifixion de saint Pierre, Jean Duval (tissage attribué à), Robert de Lisle et Jean de Lastre (d’après des cartons de), v. 1542-1546, tapisserie en laine et soie issue de la Tenture de la Vie de saint Pierre, 140 x 460 cm, Saumur, église Saint-Pierre.
Crédits : Collection Ville de Saumur © cliché Bruno Rousseau – Conservation départementale de Maine-et-Loire
Pièce 1 : Le Tribut payé aux juifs, La Transfiguration : H. 143 ; L. 527 cm.
Pièce 2 : La Guérison du boiteux à la Belle Porte, La Mort d’Ananias : H. 146 ; L. 446 cm.
Pièce 3 : La Mort de Saphire : H. 146 ; L. 218 cm.
Pièce 4 : La Résurrection de Thabita : H. 145 ; L. 222 cm.
Pièce 5 : Saint Pierre visité par l’ange, La Chaire d’Antioche : H. 140 ; L. 460 cm.
Pièce 6 : Le Jugement de saint Pierre, la Crucifixion de saint Pierre : H. 140 ; L. 460 cm.
L’église Saint-Pierre de Saumur conserve la tenture de la Vie de saint Pierre en six pièces tissée à Tours au XVIe siècle. Dix épisodes de la vie de l’apôtre sont figurés et décrits par un court texte placé en partie basse (tituli) ; chaque tapisserie comprend deux scènes à l’exception de deux pièces, plus petites, qui n’en comptent qu’une. Cette œuvre monumentale ordonnée par la confrérie du Saint-Sacrement en 1542 était destinée à être accrochée aux dosserets des stalles du Chœur [Vacquet, 2002, p. 134]. Une première pièce fut livrée en 1545 [Verdier, 1931, p. 12] et la tenture achevée en 1546, millésime qui apparaît en bas à droite dans La Résurrection de Thabita [Verdier, 1931, p. 12]. Les tapisseries, parures fragiles et coûteuses, n’étaient exposées que pendant les jours de fête. Le reste de l’année, elles étaient remplacées par les patrons (modèles sur toiles de lin), qui furent toutefois jetés au XVIIe siècle car jugés trop usés [Parure…., 2020, p. 224].
Les modèles de la tenture de la Vie de Saint-Pierre furent réalisés successivement par deux peintres angevins à partir de 1542 : Robert de Lisle fournit cinq « hystoires » (scènes) puis Jean de Lastre (ou de Laistre) les cinq patrons suivants. Les personnages de grande taille sont disposés en frise selon un principe d’isocéphalie. Les premières scènes attribuées à Robert de Lisle attestent la circulation de modèles bellifontains et parisiens [Vacquet, 2007, p. 29 ; Parure…, 2020, cat. 11].
La Tenture de la Vie de saint Pierre a été tissée à Tours. Selon les archives, deux tapissiers tourangeaux, dont le nom n’est pas précisé, vinrent à Saumur pour négocier avec les procureurs de la confrérie. Toutefois le détail des pilastres, qui séparent les épisodes narratifs, ont conduit les historiens de l’art à attribuer le tissage à l’atelier du lissier tourangeau Jean Duval. Ce motif de pilastres à l’antique soutenant une architrave et reposant sur un soubassement est le même que celui de la tapisserie de la Vocation de saint Pierre de l’église Notre-Dame de Nantilly de Saumur commandée en 1535 par la confrérie de saint Sébastien à l’atelier tourangeau de Jean Duval d’après les cartons du peintre Jean de Pozay résidant à Bourgueil [Verdier, 1931, p. 5 et Vacquet, 2007, p. 29 ; Parure…, 2020, cat. 11]. On la retrouve sur la tenture de la Vie de saint Saturnin commandée par Jacques de Beaune vers 1525, pour cette raison également attribuée à Duval, dont trois pièces sont conservées au château de Langeais et à la cathédrale d’Angers. De même, les personnages de la Vocation de saint Pierre présentent de fortes parentés avec ceux de l’Envoi de saint Saturnin (cathédrale d’Angers) [Vacquet, 2007, p. 31].
Depuis 1515, Jean Duval était le gendre de Nicolas de Mortaigne, un maître tapissier parisien originaire de Tournai qui s’était établi à Tours au début des années 1520, avant de retourner dans la capitale. À la mort de son beau-père vers 1530, il s’installa définitivement dans la cité tourangelle où il s’éteignit en 1552. À l’exception de la tenture de la confrérie de saint Sébastien, une seule œuvre, aujourd’hui perdue, est documentée : « un tappiz de haulte lyce », réalisé en 1541 pour la Ville de Tours [Giraudet, 1885, p. 146]. La tenture de la Vie de saint Pierre est un des rares exemples de la florissante production tourangelle de tapisseries au XVIe siècle comme en témoigne l’humaniste Jean Brèche dans le traité Ad titulum pendectarum De verborum et rerum significatione (1556) [Parures…, 2020, p. 48]. A compléter avec la traduction de Brèche au sujet de Duval (p. 410-411).
Bibliographie
Bertrand Pascal-François, « Les ateliers secondaires de tapisserie en France : méthode d’analyse », dans Massin-Le Goff Guy, Vacquet Étienne (dir.), Regards sur la tapisserie, actes du colloque d’Angers du 18 au 20 mai 2000, Arles, Actes sud, 2002, p. 27-42.
Bosseboeuf Louis-Auguste, « La manufacture de tapisserie de Tours », dans Mémoires de la Société archéologique de Touraine, 43, 1904, p. 173-362.
Parures de fête, splendeurs des tapisseries des collections de Saumur, catalogue de l’exposition de l’abbaye royale de Fontevraud du 18 septembre au 10 novembre 2019, Gand, Snoeck, 2020, cat. 12 (notice d’Étienne Vacquet).
Vacquet Étienne, « La tenture de la Vie de saint Pierre de Saumur : une présentation didactique », dans Massin-Le Goff Guy, Vacquet Étienne (dir.), Regards sur la tapisserie, actes du colloque d’Angers du 18 au 20 mai 2000, Arles, Actes sud, 2002, p. 133-135.
Vacquet Étienne, « Pour un corpus des tapisseries tourangelles réalisées sous François Ier », dans Revue de l’art, 157, 2007-3, p. 23-33.
Verdier chanoine, « Tapisserie de l’Histoire de saint Pierre en l’église Saint-Pierre de Saumur », dans Bulletin de la société des lettres, sciences et arts du Saumurois, 1931, 60, p. 5-19.