Tours, 4 rue Briçonnet
L’Hôtel de la Jaille a été démoli en 1973 pour les besoins de la construction de l’Université de Tours sur le site des Tanneurs. Il était localisé au 4 rue Briçonnet (ce numéro n’existe plus aujourd’hui). L’hôtel était situé au nord de la rue Briçonnet – autrefois rue des Trois Pucelles – qui se prolongeait vers les murs de la ville, aux abords de la Loire. L’Hôtel de la Jaille ou des Trois Pucelles était compris dans un îlot formé par la rue des Tanneurs au sud, la rue de la Paix à l’est, la rue des Trois pucelles (désormais Briçonnet) à l’ouest et la rue de la Poissonnerie. C’est grâce à l’étude architecturale effectuée par Albert Archambault, architecte chargé de la surveillance des démolitions, que nous sont parvenus des relevés. Bernard Toulier réalisa un plan de situation d’après ces données dans son article « L’Hôtel dit « de la Jaille » et l’hôtellerie des Trois Pucelles à Tours » [Toulier, 1975, p. 588]. Sur ce plan apparaît trois corps de bâtiments « A », « B » et « C ».
En 1909, Édouard Gatian de Clérambault dessina la face sud du « porche d‘entrée (XIIIe-XVIe) » depuis la rue des Tanneurs. Sur le mur pignon coiffé d’un toit à deux versants, le rez-de-chaussée est devancé par un appentis. Au niveau supérieur, les traces d’encadrement semblent être celles de deux baies à arc brisé et d’une baie géminée murées. L’appentis masquerait-il une porte en symétrie de celle visible sur le relevé du même pignon ? Sur la face nord, cette porte couverte d’un arc brisé était manifestement une porte cochère. Elle est épaulée de deux pilastres formant contreforts. Celui de droite est Accosté d’une baie en arc plein cintre. La fenêtre à pilastres du XVIe siècle percée dans une ancienne baie en arc brisé médiévale montre une pratique du réemploi par souci d’économie et/ou comme témoin du passé. Une baie géminée à arc trilobée également médiévale complète le sommet du pignon. La face nord était à l’origine la face externe d’un bâtiment se développant plus au sud tandis que la face sud était inversement la face interne. La fenêtre à pilastres montre aussi que c’est à partir du XVIe siècle que l’on peut supposer l’édification du bâtiment « A » s’appuyant sur le pignon du porche d’entrée médiéval [Toulier, 1975, p. 587, 590].
Sur un autre dessin d’Édouard Gatian de Clérambault, la façade sur cour du bâtiment « A » est masquée par un appentis. Le rez-de-chaussée de cet appentis est en pierre de taille alors qu’au-dessus s’élève un étage en pans de bois couverts par un essentage d’ardoises. On observe le même traitement sur la tourelle d’escalier en vis située en demi-hors-œuvre qui relie les bâtiments « A », « B » et « C ». Sur les photographies prises avant la destruction, l’appentis du bâtiment « A » est recouvert d’un enduit. Quant à la façade sud du bâtiment « C », le surcroît est recouvert par un essentage d’ardoises et les fenêtres à crossette sont à hauts vantaux du XVIIe siècle. Selon Robert Ranjard, le bâtiment « C » était une hôtellerie : la « rue Briçonnet portait autrefois le nom de rue des Trois Pucelles, qui venait d’une enseigne représentant trois poissons, dits pucelles, pendant à une hôtellerie » [Ranjard, 1981, p. 82]. Pourtant, elle ne figure pas dans la liste des hôtelleries de Tours, dressée en 1466 pour faciliter le logement des gens de guerre [Toulier, 1975, p. 593]. Il est possible qu’après le départ de la famille de La Jaille, une hôtellerie s’installa dans l’hôtel expliquant les transformations des XVIe et XVIIe siècles [Toulier, 1975, p. 592-593].
On est en droit de se demander quel est le lien entre la famille de La Jaille et cet hôtel éponyme. La démolition en 1973 a permis la découverte d’une poutre transversale décorée de blasons peints dans le bâtiment « B ». Les deux blasons d’argent à une bande fuselée de gueules appartiennent à la famille de La Jaille. Les deux blasons fascés appartiennent quant à eux à la famille des Brisay. L’alliance entre les deux familles remontait à 1366, date où Bertrande de la Jaille avait épousé Alès ou Alo VII de Brisay ; leur petit-fils Jean de Brisay est mentionné comme chambellan de Charles VII en 1457. Ainsi, le logis du bâtiment « B » pourrait avoir été construit ou réaménagé et décoré par les La Jaille et les Brisay, quand leurs obligations de cour nécessitaient leur présence à Tours [Toulier, 1975, p. 590-592].
Bibliographie
Base POP, IA00071252
Gatian de Clérambault Édouard, « Tours qui disparaît », dans Mémoires de la Société archéologique de Touraine, T. V, 1912.
Toulier Bernard, « L’hôtel dit « de la Jaille » et l’hôtellerie des Trois Pucelles à Tours », dans Bulletin de la Société archéologique de Touraine, T. 37, 1975, p. 587-593.
Ranjard Robert, La Touraine Archéologique, Mayenne, Joseph Floch, 1981.