Portrait d’Antoine de La Barre

Antoine de la Barre (1490-1548) était le fils de Jean I de la Barre, seigneur de Véretz, et de Marie de la Primaudaie. Il était également le frère de Jean II de la Barre, un proche de François Ier, qui fut nommé prévôt puis lieutenant du roi de la ville de Paris et qui reçut en 1526 le comté d’Étampes. Antoine de la Barre eut une brillante carrière ecclésiastique puisqu’il fut chanoine de Saint-Martin de Tours, puis abbé de Sainte-Catherine-lès-Rouen avant d’être nommé en 1524 évêque d’Angoulême et archevêque de Tours en 1528. Dans le domaine des arts, il fut l’un des commanditaires du Maître de Claude de France qui enlumina pour lui plusieurs ouvrages liturgiques dont un Pontifical conservé à la BnF [Tours 1500, p. 80].

Le Portrait d’Antoine de la Barre appartenait, au même titre que le portrait de son frère exécuté également par Jean Clouet, à la collection de portraits dessinés réunie par Catherine de Médicis (1519-1589), l’épouse du roi Henri II. Le noyau de cette collection, qui réunissait des effigies de la famille royale et des plus hauts dignitaires du royaume, était constitué de l’ensemble des dessins que la reine avait acquis à la mort de l’artiste en 1541 [Zvereva, 2002, p. 8]. Elle fit ensuite compléter cet ensemble en faisant appel à ses peintres et à ceux de son  mari, parmi lesquels François Clouet, fils de Jean.

La plupart des portraits commandés par Catherine n’avaient pas pour vocation à être reproduits en peinture. La technique de la pierre noire et de la sanguine [Zvereva, 2002, p.19-20] utilisée par Jean Clouet fut mise au point par les artistes français vers 1455, peut-être par Jean Fouquet qui l’employa pour l’esquisse préparatoire du Portrait de Guillaume Jouvenel des Ursins (Berlin). Les dessins étaient produits sur une feuille de papier blanc d’un format d’environ 40 centimètres de haut sur 30 de large, qui était pliée afin d’obtenir une partie servant de brouillon et l’autre d’œuvre achevée. Les couleurs étaient d’origine minérale, la pierre noire provenant de l’ardoise et la sanguine de l’argile. C’est Jean Clouet, et surtout son fils François, qui développa cette technique et, bien que le premier la considérait avant tout comme une étape préparatoire [Mellen, 1971, p. 22], ils en firent un moyen d’expression à part entière. Par rapport aux portraits de son père, ceux de François gagnèrent en précision : les détails des costumes, notamment, y sont rendus avec une plus grande finesse.

Dans le portrait de Chantilly, Antoine de la Barre est représenté jusqu’aux épaules avec le buste et la tête tournés vers la gauche, le regard dirigé vers le lointain. Comme souvent chez Jean Clouet, le niveau de finition n’est pas homogène partout. En effet, les détails sont plus accentués au niveau du visage. La sanguine permet de reproduire la couleur de la peau et de suggérer le modelé (sous les yeux, autour de la bouche) grâce au contraste entre le rouge du crayon et le blanc du papier laissé vierge par endroits. Des zones ombrées réalisées à la pierre noire donnent en outre du volume au menton et au cou. Les cheveux, le col et la barrette sont quant à eux traités en larges hachures noires tandis que le vêtement est à peine esquissé.

Le Portrait d’Antoine de la Barre, sans atteindre la qualité de certains dessins de Jean Clouet, illustre parfaitement la manière du maître et reprend toutes les caractéristiques du prototype que la maître développa tout au long de sa carrière.

Bibliographie

Mellen Peter, Jean Clouet, Paris, Flammarion, 1971.
Scailliérez Cécile, François I^er par Clouet, catalogue de l’exposition du musée du Louvre du 23 mai au 26 août 1996, Paris, Éditions de la RMN, 1996.
Zvereva Alexandra, Les Clouet de Catherine de Médicis, catalogue de l’exposition du musée de Condé de Chantilly du 25 septembre 2002 au 6 janvier 2003, Paris, Somogy, 2002.
Zvereva Alexandra, Portraits dessinés de la cour des Valois. Les Clouet de Catherine de Médicis, Paris, Arthena, 2011.
Zvereva Alexandra, « Jehannet Clouet : étranger, peintre, officier royal, notable de Tours », dans Art et société à Tours au début de la Renaissance, actes du colloque du CESR du 10 au 12 mai 2012, Marion Boudon-Machuel, Pascale Charron (dir.), Turnhout, Brepols, 2016, p. 147-159.